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Retrouver ses esprits

Le « mercredi des Cendres » marque le début du carême. Pourquoi un mercredi ? Le temps du carême totalise 40 jours. Symboliquement le chiffre 40 est très fort. Il exprime un passage, une traversée et symbolise donc une transformation. Il évoque le chemin de 40 ans du peuple des Fils d’Israël vers la Terre promise, les 40 jours de Jésus au désert. Etant donné qu’il y a 6 semaines jusqu’au samedi Saint et qu’on ne compte pas les dimanches comme des jours de jeûnes et de pénitence, il fallait ajouter 4 jours, c’est donc le mercredi avant le premier dimanche de carême, que l’on commence le carême.

Entre les turbulences de la politique internationale et les accélérations de l’Intelligence artificielle, notre société entre dans un état de sidération et peut-être d’angoisse face à l’incertitude qui assombrit l’avenir. C’est le moment de faire une pause et de reprendre son souffle.

Une pause ! Tel est précisément le sens du carême qui débute par un rite très particulier : on vient recevoir les cendres sur sa tête ou sur son front. Tout le monde peut le faire. Il suffit d’avoir envie de revivre avec Jésus, d’avoir envie de marcher vers Pâques, envie de renaître intérieurement à la joie. C’est en commençant par reconnaitre notre péché, nos faiblesses que débute ce chemin vers la joie. C’est l’envie d’être ressuscité par Jésus, d’être pardonné, réconcilié, purifié et de retrouver ce Souffle divin qui se manifestera à la fête de la Pentecôte, à la fin du temps de Pâques.

Ce Souffle divin est celui de l’Esprit-Saint qui nous rend la vie de Dieu. La symbolique de se faire imposer des cendres sur le front, en général avec une forme de croix, aide à reconnaître la pauvreté de notre condition humaine sans Dieu. Sans Dieu : on meurt, on est comme de la cendre ! « Tu reprends leur souffle, ils expirent et retournent à leur poussière » dit le Psaume 103,29. C’est aussi un signe de deuil et de pénitence dans tout l’Ancien Testament. Il est très fréquent de se couvrir la tête de cendre. On s’assoit dans la cendre pour signifier qu’on reconnaît son péché et qu’à cause du péché, on s’éloigne de Dieu. Or Dieu n’est que vie et si l’on s’éloigne de Dieu alors on s’éloigne de la vie : on est comme de la cendre.

La cendre renvoie aussi à la poussière du commencement. En particulier dans la formule : « souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière ». Cette formule vient du livre de la Genèse. Elle signifie qu’à l’origine, l’humanité est créée à partir de la poussière du sol et que le Souffle de Dieu lui a donné vie. La poussière de la terre se dit « Adama » en hébreu. Elle reçoit son nom de celui qui vient, « Adam » doué du souffle divin. Dieu a insufflé dans ses narines un souffle de vie et l’Adam qui était fait de terre devient une personne humaine vivante (on parle d’insufflation).

L’origine de ce rite

Le mercredi des cendres apparaît au VIème siècle, mais c’est au Xème siècle dans les pays rhénans que l’on a voulu donner une expression sensible au texte liturgique en instituant le rituel de l’imposition des cendres. Ce geste accompagnait un chant latin évoquant la montée vers Dieu en se couvrant de cendres : Immutemur habitu in cinere et cilicio (« Changeons de conduite, sous la cendre et le cilice »). A partir de cet usage dans les pays rhénans, le rite s’est propagé en Gaule d’abord au XIème siècle, puis en Italie au XIIème. Le premier Pape qui a utilisé ce rite pour lui-même est Innocent III au début du XIIIème siècle. La coutume dans nos pays occidentaux consiste à brûler les rameaux utilisés lors de la dernière fête des Rameaux, le dimanche avant Pâques, et d’en fabriquer les cendres pour le carême qui va s’ouvrir.

L’enjeu du carême consiste à redécouvrir à qui s’en remettre, à qui faire confiance la traversée de notre vie ? Il s’agit de trouver la bonne inspiration qui nous vient de l’Esprit de Dieu. Il rappelle que l’humanité n’est pas abandonnée à sa solitude, à ses errances et au mal qui la tient. Il enseigne que le sens de l’existence consiste avant tout à faire du bien et à faire le bien, en manifestant de l’amour, en faisant preuve d’amour et de vérité. Toute autre ambition, si l’on y songe, se révèlera aussi vaine qu’épuisante. Puisse ce temps spirituel être une source de renouveau et d’espérance pour toute la famille humaine.


Père Laurent Stalla-Bourdillon

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