Dans un puissant message rendu public à l’occasion de la première de la pièce de théâtre Proyecto Ugaz (« Projet Ugaz ») à Lima, le Pape Léon a exprimé toute son estime et sa gratitude pour le rôle indispensable des journalistes pour le triomphe de la vérité [1]. La pièce raconte le combat mené pendant plus d’une dizaine d’années par une journaliste péruvienne, Paola Ugaz, contre le mouvement catholique ultraconservateur Sodalicio, dissous officiellement par le pape François quelques jours avant sa mort. Voici des extraits marquants de son message dont la portée est universelle :
« Cette œuvre n’est pas seulement du théâtre : elle est mémoire, dénonciation, et surtout acte de justice. (…) Votre combat pour la justice est aussi celui de l’Église. Car comme je l’écrivais il y a quelques années, « une foi qui ne touche pas les blessures du corps et de l’âme humaine est une foi qui n’a pas encore connu l’Évangile ». Aujourd’hui, nous reconnaissons cette blessure chez tant d’enfants, de jeunes et d’adultes qui ont été trahis là où ils cherchaient du réconfort ; mais aussi chez ceux qui ont risqué leur liberté et leur nom pour que la vérité ne soit pas enterrée.
Je veux exprimer ma gratitude à tous ceux qui ont persévéré dans cette cause, même lorsqu’ils ont été ignorés, discrédités, voire poursuivis en justice. (…) La prévention et le soin ne relèvent pas d’une stratégie pastorale : ils sont le cœur même de l’Évangile. Il est urgent d’enraciner dans toute l’Église une culture de la prévention qui ne tolère aucune forme d’abus — qu’il s’agisse d’abus de pouvoir, d’autorité, de conscience, spirituel ou sexuel. Cette culture ne sera véritable que si elle naît d’une vigilance active, de processus transparents, et d’une écoute sincère des personnes blessées.
Pour cela, nous avons besoin des journalistes. Aujourd’hui, je tiens à remercier en particulier Paola Ugaz pour son courage (…)
Dès le début de mon pontificat, lorsque j’ai eu le privilège de m’adresser pour la première fois aux journalistes réunis après le conclave, j’ai souligné que « la vérité n’est la propriété de personne, mais elle est la responsabilité de tous : la chercher, la garder, la servir ». Cette rencontre n’était pas un simple salut protocolaire : elle était une réaffirmation de la mission sacrée de ceux qui, par leur travail journalistique, deviennent des ponts entre les faits et la conscience des peuples, parfois au prix de grandes difficultés. (…)
Défendre un journalisme libre et éthique n’est pas seulement un acte de justice : c’est un devoir pour tous ceux qui aspirent à une démocratie solide et vivante. La culture de la rencontre ne se construit pas à coup de discours creux ou de récits manipulés, mais par des faits rapportés avec objectivité, rigueur, respect et courage.
C’est pourquoi nous exhortons les autorités péruviennes, la société civile et chaque citoyen à protéger ceux qui, des radios communautaires aux grands médias, des campagnes reculées à la capitale, informent avec intégrité et courage. Là où un journaliste est réduit au silence, c’est l’âme démocratique d’un pays qui s’affaiblit.
La liberté de la presse est un bien commun auquel il est impossible de renoncer. Ceux qui exercent cette vocation avec conscience ne doivent pas voir leur voix étouffée par des intérêts mesquins ou la peur de la vérité. À tous les communicants du Pérou, je me permets de dire avec affection pastorale : n’ayez pas peur. Par votre travail, vous pouvez être des artisans de paix, d’unité et de dialogue social. Soyez des semeurs de lumière au cœur des ténèbres.
C’est pourquoi je forme le vœu que cette œuvre soit un acte de mémoire, mais aussi un signe prophétique. Qu’elle réveille les cœurs, secoue les consciences, et nous aide à bâtir une Église où plus personne n’ait à souffrir en silence, et où la vérité ne soit plus perçue comme une menace, mais comme un chemin de libération.
Avec ma prière, mon affection et ma bénédiction apostolique,
Léon PP. XIV
Rome, 2025






